Estimations : Le grand écart ...
Après 3 mois d'assoupissement les Ventes aux Enchères reprennent.
La longue pause estivale n'a pas calmé l'appétit spéculatif de certains opérateurs du Marché de l'Art alors de mon côté inlassablement je reprends ma plume.
Je commence la nouvelle saison des ventes avec ce Christ en Ivoire qui est mis aux enchères par la SVV KOHN le 20 Octobre 2015 sous le lot N°4
CHRIST EN CROIX - Italie, fin du XVIIe siècle - Matériau Ivoire
H. 64 cm, L. 43 cm, P. 14 cm
Cet ivoire sculpté en ronde-bosse représente Jésus crucifié. Sa tête est inclinée à droite, le menton affaissé sur la poitrine. Son visage ne trahit aucune douleur malgré le supplice qu’il vient de subir et il s’en dégage même une certaine plénitude. Les traits sont fins et réguliers. L’extraordinaire chevelure bouclée, virevoltante, se déploie en longues mèches retombant en volutes sur les épaules. La barbe a été également travaillée avec soin et réalisme. L’anatomie est rendue avec douceur. Le périzonium montre des plis souples. Les jambes, dont la musculature est traitée avec nervosité sont légèrement repliées, celle de droite venant couvrir celle de gauche et créant un mouvement de déséquilibre amplifiant l’abandon dans le martyr. Cette perception « apaisée » de la Crucifixion, ce visage où aucune douleur n’apparaît associé à ce corps à la plastique souple et délicate, rappelle les caractéristiques de la production italienne de la fin du XVIIe siècle où les artistes abandonnent les représentations tragiques et ostentatoires de la souffrance pour une plus grande sérénité.
J'ai une petite remarque à faire sur l'époque prétendue de réalisation de ce Christ. Dans le titre l'époque de réalisation ne semble faire aucun doute il est clairement attribué à la fin du XVIIe siècle.
Par contre dans le texte les termes utilisés sont moins affirmatifs
... ce visage où aucune douleur n’apparaît associé à ce corps à la plastique souple et délicate, rappelle les caractéristiques de la production italienne de la fin du XVIIe siècle
J'attire votre attention sur ce point qui peut vous paraître futile parce que vous allez avoir une surprise en découvrant la suite !
Auparavant arrétons-nous sur l'estimation fournie par la SVV :
Estimation : 25 000 € / 30 000 €
Là ça grince car ce Christ n'est pas un nouveau venu sur le marché de l'Art ...
J'ai découvert la 1ère fois ce Christ en Ivoire lors d'une Vente organisée par Rennes Enchères le 27 janvier 2014. Ce Christ portait le N° de lot 401. Je vous livre son descriptif :
LOT 401
Très important Christ en ivoire sculpté, la tête aux yeux clos inclinée sur la droite, un drapé en perizonium, la jambe droite légèrement ployée. La croix avec un rouleau de parchemin en ivoire gravé des inscriptions en grec et latin "Jesus de Nazareth roi des juifs"
Beau cadre doré ajouré, mouluré et sculpté de têtes d"angelots, fruits, feuillage et coquilles - Début du XIXe siècle
Le Christ : Haut. 52 cm - Larg. 43,5 cm (de main à main)
Le cadre : Haut. 128 cm - Larg. 86 cm
ESTIMATION 3 000€ - 3 500€
Le lot fût adjugé 5 800€. Le résultat est toujours visible sur le site de Rennes Enchères
Vous observerez que le Christ est venu en janvier 2014 avec un cadre attribué au XIXe siècle. Quant à l'époque de réalisation du Christ, la Maison de Ventes Rennes Enchères avec prudence ne l'évoque pas !
Ainsi ce que Rennes Enchères en janvier 2014 a estimé 3 000€ - 3 500€ la SVV KOHN en octobre 2 015 l'estime à 25 000€- 30 000€. C'est le grand écart des estimations évoqué dans le titre de cette page.
Ce Christ en Ivoire n'a pas été dissimulé entre Janvier 2014 et Octobre 2015
Bien au contraire, il était déjà offert à la vente.
Cette photo le montre en situation au printemps 2 015 chez son détenteur.
Ainsi, l'acquéreur de Rennes, à moins que ce soit l'acquéreur de l'acquéreur, làs de ne pas trouver un nouvel acquéreur pour son Christ compte désormais sur la SVV KOHN pour parachever le travail spéculatif.
Afin de ne pas brouiller la vision des acheteurs potentiels le Christ en Ivoire a été débarrassé de son cadre du XIXe siècle.
Le terrain est ainsi mieux dégagé pour une attribution au XVIIe siècle ...
Publié le 10 octobre 2015